« arrête de dire des conneries maman, tu veux? » que je lance, légèrement exaspéré, à la femme qui m'a mis au monde. Elle a appelé à ce boulot de buzz boy que j'ai trouvé dans un club miteux pour pouvoir rentrer assez d'argent pour qu'elle arrête de devoir se contenter d'me refiler ce qu'il y a de mieux et à ne garder pour elle que les miettes. Je sais que ma mère fait son possible en focussant toute son énergie à garder un air noble quand elle me tient tête, mais je sais qu'elle ne va pas bien. Non, elle a ni cancer, ni maladie incurable, c'est juste qu'elle n'est pas fait pour le rythme trépidant de vie du commun des mortels et que son boulot minable de serveuse de 5h30 le matin à 3h l'après-midi et celui d'hôtesse de 5h à 22h la gruge à un tel point qu'elle pleure chaque fois qu'elle le peut, fume de plus en plus de clopes, ne garde la "forme" qu'à l'aide de nicotine, de caféine et de ces conneries que l'autre conne du boulot lui a refilé pour être suffisamment relaxée le soir pour dormir « adam, tu sais pourtant, t'a les cours et ta copine... la jolie blonde, tu sais de qui je parle? ». Je serre les dents, m'asseyant près d'elle sur le canapé, lui arrachant la cigarette d'entre les lèvres, en prenant une taffe discrètement avant de l'écraser dans le cendrier « jules, ouais, mais rien à voir. ça va m'man, je gère comme un pro. t'a pas engendré un putain d'crétin malgré l'père que ta choisi faut croire.. ». Elle ne sourit pas du tout, malgré tout le mal qu'il nous a fait, ce fils de pute, elle continue de tenter de le protéger ou du moins, elle évite soigneusement d'en dire le moindre mal. Elle se redresse, passe sa main sur mon visage et pose ses lèvres sur ma tempe « sans lui, tu ne serais pas toi, adam, tu le sais. invite donc la jeune Lefrançois, la manière dont tu la regardes c'est... ». J'ouvre la bouche, puis la referme, alors que j'entends l'éclat de rire joyeux - et trop rare - qui se fraye un chemin entre ses lèvres. Je sais pas comment elle fait pour m'connaître comme ça, c'est ridicule qu'une mère nous déchiffre mieux que nous même, parfois... « t'inquiète pas mon bébé, je ne dirai rien. tu m'amènerais un cachet que je dorme un coup avant mon prochain quart? ». je me lève à contre-coeur, allant chercher un truc dans sa bourse, mais lui filant plutôt de l'aspirine. Elle y verra que du feu. J'le lui dépose sur la table, ramasse c'qui traîne, pense qu'il faudrait que j'me mette en route pour le boulot « fais pas de conneries surtout ». Elle sourit « fais-en, adam, des conneries. fais-en alors que tu le peux encore... ».

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